En 1824, lorsque Joseph Colin applique le procédé d'appertisation à la sardine, les ports de Bretagne méridionale sont modestes. Ceux qui, en nombre infime, disposent d'infrastructures les doivent à des fonctions de défense ou de commerce. Quant aux ports de pêche, y compris les plus actifs, ils offrent des abris souvent précaires dans les rias ou en retrait des pointes du littoral. Un demi-siècle plus tard, la Bretagne méridionale se distingue par un semis de ports d'une extrême densité et d'une grande diversité.Presque sans charbon et sans vapeur, la région opère ainsi une véritable révolution industrielle, que traduisent les mutations économiques, financières, administratives, politiques, démographiques et sociales des ports. À partir du foyer nantais et, de façon secondaire, de Lorient, la nouvelle industrie déroule un front pionnier allant de la baie de Bourgneuf au Trégor. Si l'effacement des ports de la baie de Lannion est rapide, dans les autres régions, l'établissement des conserveries aboutit à une multiplication des équipements portuaires, au point que de nombreux ports bretons apparaissent aujourd'hui comme les héritiers de cette période. Ceux qu'animait déjà la presse sardinière, particulièrement Douarnenez et Concarneau, renforcent leurs positions. D'autres, à l'image de La Turballe, du Guilvinec et d'Étel, se hissent à des niveaux significatifs. Quelques-uns, notamment Saint-Guénolé-Penmarc'h et Loctudy, doivent attendre l'élan chalutier pour étoffer leur espace portuaire.Derrière une implantation d'apparence dispersée, plusieurs types d'espaces portuaires se dessinent (cartons B). Ils associent des ports aux sites variés (cartons C) : sites de rias, sites d'anses abritées, sites ouverts d'estran, sites de pointes, parfois avec quai ou avec jetée. Ces traits traduisent une volonté de tirer parti de toutes les occasions (les conditions nautiques, l'abri, la proximité des pêcheries, le rôle des communications).La vigueur de cette projection des hommes vers la mer s'exprime dans la presqu'île de Guérande, la presqu'île de Quiberon et les îles morbihannaises. La variété des sites portuaires dit aussi cette vitalité de la rivière d'Étel et des abords de Lorient. Là, les ports de la rade, ceux de la côte, de Kerroch à Gâvres, comme ceux de Groix, forment une des concentrations les plus denses de la région. Le dispositif développé dans le sud-est du Finistère est a priori plus ténu et s'organise autour de Concarneau, l'un des bastions de la conserverie. À l'ouest, la pléiade de ports qui garnit le cap Caval, de Penmarc'h à la rivière de Pont-l'Abbé, ainsi que les doublets d'Audierne-Plouhinec et de Douarnenez-Tréboul forment des témoignages marquants de l'époque de l'appertisation. Sur l'Iroise, Camaret, distinct de Morgat qui fonctionne en symbiose avec Douarnenez, ponctue cette «route de la sardine».