ExtraitFinlandia - Gran CanariaMikko verrouille la porte et examine le siège des toilettes de l'avion.Il a déjà décelé cinq défauts dans la banquette de l'aérogare et trois dans son fauteuil ; ce trône ne relève pas le niveau.Il crache dans la cuvette, tire la chasse. L'expectoration disparaît dans les entrailles de l'appareil, la climatisation expulse de l'air froid à côté de son oreille.Sous peu, je sonnerai à l'adresse indiquée par le grand chef, je dormirai dans un atelier d'artiste, mazette ! Mais qu'est-ce qu'un Nyman peut comprendre à la création artistique ? Peau de balle. J'arrive à vitesse grand V pour rénover la vieille piscine du big boss, j'ai décollé, je fonce, pourtant ce ne sont pas les entrepreneurs en bâtiment qui manquent à Gran Canaria.Dans quelques heures, je crèverai de chaud, je ruissellerai de transpiration. Dans quelques heures, j'enlèverai ma chemise et je démolirai à coups de masse un vieux bassin.Il prend le journal du soir glissé dans la poche du fauteuil de devant et apprend que la star la plus nunuche du moment a tiré sur son manager à la fin du repas de Noël avec un fusil utilisé pour la chasse à l'élan. Sa voisine déploie son propre magazine. Mikko réprime un haut-le-coeur : cette pouffiasse finlandaise attifée d'un boubou africain a vaporisé tous les parfums de l'aéroport sur elle et tente de se la jouer décontractée, l'avion tout entier feint de baigner dans une atmosphère de vacances.Le commandant de bord annonce une durée de vol estimée à cinq heures - nous pouvons voir sur les écrans que nous survolons la Baltique. Mikko étend ses jambes ankylosées, incline le dossier autant que possible et ferme les yeux.Johanna l'envahit. Johanna ne cesse de l'envahir. Il serait temps qu'elle disparaisse, qu'une autre la remplace, une autre, radicalement différente.
