Grégoire grimpa deux par deux les marches de l'escalator du métro débouchant sur la place Gartinale. La tête baignée par la lumière du jour, il ralentit l'allure, scannant discrètement les silhouettes alentour. À l'affût. Sauf qu'il n'avait rien d'un chasseur et tout de la proie. Près de lui, les passants passaient, rassurants, affairés. Pas d'uniforme, pas de gyrophare. Alors, Grégoire porta son regard vers l'autre côté de la place.L'homme - ou plutôt l'ado, il ne semblait pas tellement plus âgé que Grégoire - l'attendait. Impossible de le rater ! Dos penché et fesses serrées, il parcourait nerveusement le bout de trottoir reliant le parking des vélos à l'entrée du parc. Aller, retour. Aller, retour. Il aurait voulu paraître suspect qu'il n'aurait pas trépigné autrement. Mais le sac qu'il tenait à bout de bras était en papier. Un bon point pour lui, songea Grégoire. Du plastique l'aurait inquiété.Encore quelques pas, et Grégoire récita la phrase convenue ensemble lors de leurs échanges par mail :- C'est pour ma commande spéciale.Le fournisseur sursauta et le dévisagea avec méfiance.- T'as le fric ?- Oui, mais je vérifie l'état de la marchandise.- OK, là, sur le banc. Assieds-toi et urge. Grégoire posa ses pieds sur le banc, prenant le dossier comme assise. L'homme se mordillait la lèvre inférieure. Quand Grégoire eut ouvert la boîte contenue dans le sachet en kraft, l'homme déclara :- Y a pas les papiers, t'étais prévenu. File-moi la thune.Grégoire fit pivoter son sac à dos jusque sur ses genoux. Il y plongea la main. L'homme lui arracha l'enveloppe qu'il en tira. Nerveux, il compta les billets à l'abri des regards, sous la capuche démesurée version chaperon rouge de son jogging.- C'est bon.Sans un mot de plus, il se leva, traversa la place à grandes enjambées et s'engouffra dans la bouche de métro.